Back-Up : le making-off

L’idée d’écrire une micro série de SF ne date pas d’hier et nombreux sont les auteurs qui se livrent à cet exercice avec ses exigences, à commencer par le calibrage : 500 signes espaces comprises sur Mastodon (140 sur twitter). En ce qui concerne l’oiseau bleu, j’ai écrit une twitter-fiction, intitulée 3 000 pieds, entre mai et octobre 2013. Je n’en suis donc pas à mon coup d’essai.

Ces plateformes se prêtent plutôt bien à l’exercice où chaque mot est pesé, chaque phrase taillée au caractère près. Les phrases sont évidemment raccourcies, les descriptions minimales et le propos plus incisif que dans un texte de construction classique. À ce sujet, je vous invite à parcourir La Fabrique de Littérature Microscopique, un blog littéraire de micronouvelles.
En matière de création, la forme spécifique de la micronouvelle est certes ardue, mais elle aiguise le sens de la formule qui sommeille en nous. Je pense que c’est plein d’enseignements.

Tycho

Twitter vs Mastodon

À présent, je possède un point de comparaison entre Twitter et Mastodon. Sur ce dernier, le calibrage augmenté permet l’inclusion de véritables dialogues dans la narration. À mon sens, il s’agit là de la principale différence. Dans 3 000 pieds, les dialogues étaient suggérés, implicités dans le fil de la narration, sans les tirets de dialogues, parce que la forme ne le permettait pas. Sur Mastodon, j’ai pu intégrer des saynettes avec dialogues ce qui apporte plus de vivant. Cela dit, chaque mot reste pesé et il faut jouer de l’incise pour véhiculer du ressenti.

Autre point : là où j’avais confiné l’action de 3 000 pieds dans un lieu fermé - une tour -, j’ai inversement ouvert Back-Up sur d’autres fenêtres géographiques : Berlin, Paris, New-York, Sao-Paulo ou encore Nairobi, ces lieux apparaissent comme des flashs, des flashs tragiques qui, mis bout à bout, témoignent de la situation sur Terre. Ce faisant, la micro série acquiert son caractère de « climatic fiction », un enjeu majeur de notre XXIème siècle.
L’absence de volonté politique forte et de signes d’une amélioration me conduise évidemment à ouvrir des fenêtres sur des inversions de situations : des réfugiés américains au Mexique, de fortunés européens exilés au Kenya, une Afrique devenue puissance, une Chine spatiale, etc. Ces petites touches renforcent l’effet dramatique (déjà engagé avec Dealer d’iceberg) mais plus notre civilisation se développe moins j’y vois de la fiction. Je fais partie des personnes qui ne doutent pas que le changement climatique va bouleverser les anciens équilibres.

L’héroïne : Tammy Tusk

Tammy Tusk

Je ne pouvais pas terminer ce laïus sans évoquer Tammy Tusk.
Les plus attentifs auront compris qu’Aaron Tusk et Tammy Tusk se réfèrent au célèbre créateur de l’Hyperloop, Elon Musk. L’homme n’est sans doute pas parfait - parfois dépeint en tyran par ses détracteurs - mais en tant qu’auteur de SF, ses propos et ses réalisations ne manquent pas de m’interpeller, de me questionner. L’hommage s’imposait et je suis sûr que l’idée d’un back-up de chaque humain en orbite lunaire le ferait sourire (ou pas). Autre terme en vogue : cela ferait un excellent sujet de réflexion « transhumaniste ».
Pour en revenir à l’héroïne : Tammy est noire, souffre de la perte de l’usage de ses jambes et elle est amoureuse de Viola, ce qui me permet d’aborder trois points qui me semblent mis à mal de nos jours. La condition de la femme, de surcroît de « couleur », trop souvent reléguée au rang de potiche ou de faire-valoir, voire de caution éthnique.
Étant personnellement concerné, le handicap est également un sujet qui me tient à cœur. L’aborder dans une œuvre de fiction me semble d’à-propos alors que partout, les droits des personnes handicapées sont remis en cause. À ce titre, je voulais aussi montrer que sur ce plan, l’espace, l’absence de pesanteur, possède un pouvoir égalisateur… Ce qui me semble très intéressant.
Enfin, autre minorité particulièrement attaquée ces derniers temps, les communautés LGBT (Lesbian, Gay, Bi-sexual, Transgenres). Je n’ai pas la connaissance approfondie de ces sujets et en tant que mâle hétéro, mon « formatage social » induit forcément un biais. Mais voilà : Tammy aime Viola, et pour moi, le message est bien là : c’est d’amour qu’il s’agit.
J’aurais l’occasion de revenir sur ces questions dans un prochain projet en cours d’écriture.

Petit bonus illustré

La création de Back-Up aura été plutôt rapide (l’essentiel étant écrit en 5 jours). J’ai choisi d’y ajouter des illustrations - conçues sous photoshop par assemblage et mélange de photos - car l’image est un bon vecteur promotionnel. Cela dit, vous remarquerez qu’elles sont assez diffuses, plus suggestives que détaillées.
Pour finir, je te tenais à vous remercier, vous tous et toutes : vous qui suivez les auteur.e.s, qui les soutenez, qui participez par vos engagements (chroniques, blogs, commentaires), vos soutiens (financement via Tipeee ou autres).

Est-ce que je recommencerai l’expérience ?

Je maintiens le suspense … :-)